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Hater-generated content bi-mensuel sur le monde du travail. Sort le jeudi mais le mood est "comme un lundi".

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Par CDLT
29 sept. · 8 mn à lire
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Plus gros le logo - 2/2

Pour faire des brands à part

Voici la deuxième partie de cette série commencée la sem... précédemment. D’habitude, notre ligne édito passant sans vergogne du coca light, les gens qui s’abonnent suite à un top topito à la con se retrouvent avec la semaine suivante un article sur le mal-être au travail, EH BIEN POUR UNE FOIS nous offrons de la cohérence. On essaiera d’éviter à l’avenir, promis.

Bref, je répète pour les deux du fond : on va parler branding en communication.
Je vous avais laissé·es sur la promesse qu’on s’attaquerait même aux éléments les plus rigolos. À la réflexion, on n’a pas tous·tes la même définition de rigolo, donc ne vous emballez pas non plus (moi quand j’étais petite j’aimais bien lire le dictionnaire).

Bref nous revoici en route pour un voyage dans les tréfonds du brand cue.

7/ TU M’ÉTONNES (OF VOICE)

Celui-là, il est à la fois évident et un peu ennuyeux.

Parce qu’autant, le tone of voice peut être un élément distinctif en béton, autant quand on pense à des tonalités de marque marquantes, au-delà des grands classiques type Nike, The Economist and co, on pense plus facilement à des marques rigolotes, type Volkswagen, qui manie depuis 60 piges le pince-sans-rire avec classe (que j’admire, si tu permets).Mais on pense aussi à cette épidémie de startups et DNVB cool, des marques de food cool qui veulent faire du Michel&Augustin (PITIÉ IL EST TEMPS DE FAIRE LE DEUIL DE CETTE REF, PLEASE) aux marques de services cool, qui ont toutes à peu près la même tonalité witty/friendly/grattante qui est aussi celle qui marche le mieux sur les réseaux sociaux, l’un de leurs supports principaux de com.
Et donc qui n’est plus si différenciante, CQFD, JPP.

Et si dans tout ça Backmarket sort du lot (faut dire que globalement toutes les autres l’ont pompé), c’est probablement parce qu’elle :
- déploie une tonalité cohérente de sa com à son site en passant par les blagues à la con dans ses mails (ce qui est le but d’une tonalité, mais entre la théorie et la pratique hein).
- a des plans médias solides
- a des trucs intéressants à dire
Ce qui n’est pas donné à tout le monde.

Enfin bref, si on voulait tenter de peut-être dire un truc utile sur le sujet, on pourrait avancer qu’un tone of voice, ça ne marche comme asset de marque que quand on fait des choix. Des vrais choix. Donc des choix qui ne plaisent pas à tout le monde, ou qui ne ressemblent pas à ce que tout le monde fait. Parce que globalement, pour une marque, choisir d’être “empathique mais pas larmoyante”, “souriante mais pas hilarante”, “proche mais pas invasive” globalement c’est choisir rien.

8/ UNE MÉCANIQUE (TES GRANDS MORTS)

Ça c’est un truc qui s’applique globalement JUSTE à la com, qui souvent vit d’abord en film et qui est globalement surtout un élément de plateforme créative, mais qui peut avoir un effet assez canon en distinctiveness (distinctivité ?).

On se parle d’histoire/de mécanique créative.
Genre, le fait que, quelle que soit la forme que ça prend, au final ta marque elle raconte toujours la même histoire.

Nike va te raconter une histoire de dépassement de soi, John Lewis à Noël va te raconter une histoire de thoughtful gifting, Snickers va te raconter une histoire où avant avant de le bouffer t’es chelou·e, après ça va (que se passe-t-il si t’es chelou·e de base, ça l’histoire ne le dit pas), Lego va te montrer le résultat de l’imagination des enfants. Et globalement, sa capacité à faire raconter la même chose de mille façons différentes et le meilleur stress-test d’une plateforme créative, c’est évident hein, mais bon.

9/ LES SONS, LES SONS (ENTRER LE SOLEIL)

Ma catégorie fétiche.
Même si on ne croit plus les Google et Amazon qui t’expliquent que bientôt internet sera full audio (la voice, soooo 2018), on n’imagine pas tout ce que les bruits peuvent faire pour nous. Il y a :

A/ Le jingle

Genre SNCF qui fait “teu teu teuleu”, FDJ qui fait “wo wo wowo”, Mcdo qui fait “ta la ta ta taaa”, Direct Assurance qui fait “ tin tin… tinlinlin”, Netflix qui fait “toudoum”, oui je m’amuse beaucoup plus à écrire ce truc que vous à le lire je sais. C’est couillon un jingle, mais ça s’imprime dans ton cerveau comme une semelle dans le béton frais.

B/ La voix

Alors parfois ça s’overlappe avec les célébrités, mais si je vous dis voix de la SNCF vous pensez à Simone, si je vous dis Malongo vous entendez Richard Bohringer vous sussurer des trucs fairtrade, si je vous dis Lurpak vous entendez cette grosse voix grave qui est déjà un peu du food porn, et puis Système U ils ont eu Prévost à un moment. Bref, c’est sûr ça marche (un peu) moins bien en print (un peu), mais une voix bien à toi, sur une pub radio par exemple, ça évite de dire le nom de ta marque 46 fois en 20 secondes. Trouver une voix unique c’est pas facile, ça peut être coûteux quand c’est des gens connus, mais c’est aussi trop souvent sous-estimé, la dernière roue du carrosse, la… voix de garage.

C/ Une chanson/musique.

Oui bon vous connaissez (la chanson).

D/ Les bruits divers et variés

Là, moi cette catégorie, ça me met en joie (on rappelle, on est tous différent·es, dictionnaire toussa).

Y’a les bruits de ton produit, déjà, le truc qui a permis à Coca de faire ça :

Les bruits en rapport avec la consommation de ton produit, genre le “AAAAAH” des gens qui boivent un Perrier dans leurs pubs, qui te dit que l’eau ça désaltère, ou KFC France qui est en train de monopoliser le croustillant. Aussi des bruits random que tu t’appropries, genre Paco Rabanne qui a associé One Million au claquement de doigts au point d’en faire des PRINTS.

Bref, les bruits, c’est la vie.

10/ LES GESTES (BARRIÈRE)

Ça aussi ça m’éclate.
Comme les sons, y’a des marques qui possèdent des gestes.
Ne reparlons pas de Paco Rabanne, y’a aussi cette marque de body spray qui pue avec son gros pschiit en X sur ton torse d’homme moderne (NE FAITES PAS ÇA CHEZ VOUS). Le biscuit noir et blanc qu’on fait twister pour l’ouvrir, le yaourt que tu retournes et que t’en retires la languette et ça fait flop, on peut remettre ici le Swipe, et aussi cette boisson à l’orange qu’il faut la secouer, peut-être même cette tente deux secondes que tu lances dans le grand wild, ainsi que le signe égal “Le changement c’est maintenant” de la campagne de Holl… je m’égare.

C’est bête, mais dans une partie de Time’s Up Marques (qui serait le jeu le plus chiant de la Création ne faites pas ça merci), ça marcherait du tonnerre.

11/ (LA CARTE ET) LE TERRITOIRE

Alors ça redevient un peu flou, mais vous avez déjà dû voir passer une prez stratégique qui vous dit que Kellog’s possède le “petit déjeuner”, que Disney possède “la magie”, qu’Ikea possède “le quotidien” Que ça soit des territoires symboliques comme ceux-là, ou des mondes un peu plus publicitaires (genre l’île d’Oasis, le luxe bling doré de Dior J’Adore, le pôle Nord de Coca à Noël) bref, c’est pas inutile de posséder un territoire (sauf quand on est un 4x4 et que son territoire c’est le passage de la ville à la nature, ça c’est pas un territoire c’est un itinéraire Google Maps).

12/ UN MOT

On boucle avec un dernier truc chelou mais pas tant que ça.
Y’a des marques qui possèdent un mot, ou une notion. Souvent issue de sa signature de marque ou d’un nom de produit, mais qui est devenue un asset à part entière, et qui est souvent à elle toute seule un brief créatif inépuisable.
Si je vous dis priceless a priori vous pensez à une certaine carte bancaire, si je vous dis safety vous pensez à une certaine marque de voiture, si je vous dis malinx vous hurlez un nom de félin. Après y’a une certaine marque de boisson susnommée qui a tenté de posséder le happiness, et une marque de chocolat violette qui a tenté la joy, de toute façon si vous êtes trop gras trop sucré trop salé il vous reste plus que ça, d’aller chercher bonheur.

On va arrêter cette liste ici avant de sombrer le pur random, genre les… “trucs”? Je sais pas comment classer la fleur rouge Kenzo ou la Petite Robe noire de Guerlain, on survivra.

Rangeons la chambre

Evidemment tous ces assets n’ont pas la même importance, le même impact, la même longévité ni la même capacité à vivre partout.

Si on voulait mettre un peu d’ordre, on pourrait les classer comme ça :

Assets durables / liés à la marque : couleur, forme, typo, tonalité, produit/pack, jingle
Assets de campagne / liés à une plateforme créa : personnage, mécanique, les autres sons (chanson, voix, bruits), gestes, territoire, slogan évidemment

Sachant qu’un asset de plateforme créative peut devenir tellement propriétaire qu’il en vient à faire partie des assets durables.

Bref

Cette énumération interminable n’a qu’un but, je l’ai dit mais je le redis car même avec des gros brand cues, la répétition est la clé de la mémorisation : en arriver à voir toutes ces techniques comme une boîte à outils avec laquelle jouer, plutôt que des contraintes reloues qu’on applique lourdement en fin de process créatif. Même les plus lourdingues d’entre elles peuvent être twistées, revisitées comme on dirait à Top Chef pour en faire quelque chose de fun tout en ayant les moyens d’argumenter face à son client sur ce qu’on a fait pour que les campagnes qu’il paye lui soient attribuées.

Si vous êtes encore là (déjà je vous kiffe) vous avez maintenant peut-être envie de retourner à vos occupations plutôt que d’entrer dans les nuances de l’application de ces modèles, et qui pourrait vous en vouloir ?
Donc on va dire simplement que RIEN de tout ça n’est une recette du succès, que toutes les marques et tous les secteurs n’en ont pas besoin de la même façon. Que par exemple quand tu es dans les services et qu’on voit pas ton produit, là ça peut aider. Ou que c’est un parfum et qu’on le sent pas, là aussi. Ou quand ton produit est absolument pas très différent de ses concurrents mais qu’ils bastonnent en média eux. Ou que ta catégorie fonctionne principalement sur de la présence à l’esprit. Ou que justement tu peux pas bastonner en média en permanence, que tu n’en aies pas les moyens ou qu’il y ait une forte saisonnalité dans ton offre. Bref, parfois ça aide.

Parfois pas.
Parce que dans la vie rien n’est sûr.
C’est ça qu’est beau.

Bisous,

Sev